mercredi, octobre 11, 2006

Sin City

Est-il nécessaire d'avoir pris connaissance de l'oeuvre de Frank Miller afin d'apprécier Sin City? Non. Est-il nécessaire d'avoir pris connaissance de l'oeuvre de Frank Miller afin de BIEN apprécier Sin City? Sans doute. En cela réside le problème.

Bien calé dans son siège, on est emballé, charmé, hypnotisé. Les pupilles dilatées par l'obscurité de la salle sont avides d'images délicieusement frappantes et sont rassasiées, masochites occasionnelles qui n'attendent que de se faire violenter de la sorte. Roberto Rodriguez se fait pardonner (enfin) de The Faculty et autres Desperado à coup de grisaille rehaussée de gliclées de couleurs brutes, aussi primaires que les âmes et personnages qu'elles déguisent.

La galerie de portraits est impressionnante, dévoilée au préalable par le générique qui laisse défiler les nonms d'acteurs tous meilleurs les uns que les autres, présentés sous les traits de leurs alter-ego scénarisés et dessinés.

Le film s'ouvre ainsi sur trois histoires aussi noires qu'elles sont habillées de cette grisaille parfois colorisée, de façon symbolique la plupart du temps. Jolie façon d'atténuer la violence des geysers sanguinolents.Marv hurle et dégomme, Dwight poursuit, et Hartigan se fait poursuivre. Les personnages secondaires magnifient et assaisonnent cette mixture scénaristique qui interpénètre, croise, mêle les histoires les unes aux autres. On pense à Pulp Fiction (et oui! ENCORE!), mais surtout aux polars à l'ambiance aussi encrassée que les mains de leurs héros. La caméra de Rodriguez filme de manière assurée, virevolte quand il y en a besoin et heureusement, on ne pense pas à Matrix (et oui! ENFIN!).

Où est donc le problème? Trop d'esthétique tue l'esthétique? Peut-être, ça frise parfois l'excèse de zèle. Une bande dessinée a sa propre "personnalité", inutile de simplement la transposer au cinéma: les deux domaines abritent des oeuvres qui se construisent selon des critères radicalement différents.

Et si l'on cherchait du côté du scénario (pardon Frank Miller)? Ces "instantanés dans la vie de..." ont un fort goût de reviens-y. Et encore une fois, on pense à Pulp Fiction et l'on se fait donc la même réflexion: c'est aussi frustrant! Là encore se dresse la question que je posais au début de mon verbiage: est-il nécessaire de connaître l'oeuvre de Frank Miller afin de BIEN apprécier Sin City? La réponse se précise vers l'affirmative.

En définitive, le film plait beaucoup, mais l'envie d'aller voir du côté des dessins dont il est inspiré est la plus forte. Certains soutiennent que les images de Frank Miller sont plus que fidèlement reconstruites, elles sont décalquées pour être mises en mouvement. Ca tape à l'oeil mais ne poursuit pas le chemin jusqu'au cerveau. Ainsi le film perd-t-il un peu en intérêt, et semble-t-il la parfaite retranscription sans fautes de copie qui vaudrait à l'élève Rodriguez la note maximale dans son domaine: un parfait exercice de style.

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