XX
C'est ce qu'il y a d'écrit sur ma carte d'identité génétique. Quand on me voit, d'ailleurs, on s'en rend compte. J'ai tout ce dont une XX a besoin pour être une parfaite XX (parfaite, c'est le terme rhétorique pour exprimer l'idée que l'on colle parfaitement à son type, je ne préfère pas m'étendre sur d'éventuelles considérations esthétiques qui me fâcheraient quelque peu). C'est dans la tête qu'il y a quelque chose qui cloche. Un Y semble s'être caché dans ma matière grise.
Il y a une presse spécialisée pour les XX, pleine d'articles répondant aux principales de nos soit-disant préoccupations. Quand on feuillette, c'est effrayant: "comment perdre du poids le plus rapidement possible sans se fatiguer sinon personne n'acceptera de vous laisser vous promener en maillot de bain sur la plage"; "l'accessoire inutile qu'il faut ABSOOOOOLUMENT avoir cet été et que l'on va toutes s'arracher parceque Scarlett Johansson a été vue avec le 15 mars 2006"; "comment jeter le mec que l'on s'est fait la veille sans passer pour une salope"; "comment se débarasser de la rivale que l'on a au bureau sans pitié ni humanité (de façon très féminine, quoi)"... A ce stade mon X s'atrophie pour laisser hurler le Y qui est en moi: il faut se rendre à l'évidence, tout cet univers me répugne, et ne m'intéresse pas.
Il se manifeste également lorsqu'une de mes congénères TOTALEMENT XX et qui l'assume, essaie de discuter avec moi: "Trop beau ton t-shirt! Tu l'as vu dans quel magazine?"; "t'utilises quelle crème le soir?"; "t'as vu le dernier fond de teint l'Oréal?". Dès qu'elle aborde ce genre de sujet, je n'ai plus rien à dire, et là encore Y aurait l'intention de lui parler à ma place. Lorsque j'achète un vêtement, je ne l'ai vu dans aucun cahier de tendance qui soit, je l'ai remarqué parcequ'il m'a plu et qu'il correspondait à mes goûts. Pas ceux de Vogue. D'ailleurs, ça simplifie grandement la vie!
Puis arrive le printemps. On se lève, on sirote son café devant les images mouvantes de la télé parceque ça réveille, et le cortège de pubs vous donnerait presque envie d'aller vous recoucher: "la cème X vous enlèvera toute cette vilaine graisse qui s'accroche à vos fesses"; "la crème Z vous elèvera toutes ces vilaines rides qui vous font paraître votre âge (quelle honte, sans rire!)"; et tout le cortège d'artifices du parfait home-chirurgien-esthétique qui vous transforment en machin bricolé d'astuces casse-gueule qui dégoulinent au moindre signe de pluie. Quand on sort, ça n'est pas mieux. Y'en a partout. Des affiches qui vous rappellent que vous n'êtes pas assez mince, pas assez jeune, pas assez riche, pas assez bien habillée...
Je n'ai que de rares amies filles, et les seules que j'aie sont aussi peu féminines que moi. C'est tellement agréable de pouvoir se promener dans la boue sans y faire attention, de grimper aux arbres, d'avoir des sacs énormes dans lesquels on peut avoir tout ce dont on a besoin et plus, de pouvoir les balancer où on veut sans que ça ne craigne rien, de boire de la bière et faire suivre d'un concours de rots, de balancer des grossièretés plus grosses que nous, de dormir n'importe où et de se réveiller dans n'importe quel état. Quand on est une fille, on n'y a pas droit. Quand on le prend, on est la petite rigolote, mais on se fait souvent dire qu'on est un "vrai pote" (alors que souvent on aimerait plus parcequ'on a quand même pas oublié qu'on était une fille, nous )
Ce qui me reste à faire? Continuer à jongler avec X et Y (eh oui, mon zamoureux, tu vas devoir continuer à te demander si tu n'es pas un homo refoulé ) et laisser passer le temps. Avec lui s'en iront ces foutues affiches...
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